Auteur

Serge Reitchess

Professeur (retraité) agrégé d’EPS, collège Marie-Curie, Les Lilas (Seine-Saint-Denis) ;

Professeur (retraité) agrégé d’EPS, collège Marie-Curie, Les Lilas (Seine-Saint-Denis) ; enseignant en formation des maîtres dans les Écoles normales de Seine-Saint-Denis (1982-1986) ; responsable de la formation continue en rugby des enseignants d’EPS de l’académie de Créteil (1990-2017) ; titulaire d’une thèse de troisième cycle en sciences et techniques des activités physiques et sportives (1986).

Le Rugby : analyse théorique et pédagogique, 1966 (Préambule et Introduction)

Présentation : Serge Reitchess

Après plus de dix ans d’expériences professionnelles, d’entraineur et d’enseignant, René Deleplace formule ses analyses avant-gardistes du jeu, tant sur le plan du règlement, que sur une logique systématisée des prises de décisions tactiques.

Elles furent mises en œuvre avec l’aide de Julien Saby (Directeur des stages FFR), dans des stages de formation de cadres (futurs cadres techniques FFR), et à partir de 1960, au comité des Flandres avec le Stage d’Arras.

Cette publication fut précédée par la présentation de ces analyses dans de nombreux articles de la revue EPS à la fin des années 1950.

L’idée organisatrice de l’ouvrage tient au fait, que René Deleplace, souhaite faire évoluer « pas à pas, les gens du monde du rugby » d’une conception traditionnelle, techniciste et de justesse d’exécution (« la seule admise alors »), à la logique explicite et systématisée des choix dans le mouvement du jeu.

Ainsi, son effort de vulgarisation se concrétise dans le contenu, l’organisation et la structure de l’ouvrage :

  • Il porte dans la première partie des propositions novatrices sur une utilisation pédagogique des règles, avec le rugby à 7 ou 8 joueurs,  tant pour le jeu que pour des progrès techniques.
  • La seconde partie, la plus détaillée avec près de trois cents pages, traite de manière précise et fulgurante de l’analyse des logiques tactiques et techniques « homme à homme » pris dans leur compréhension des rapports d’espaces et de temps.
  • Enfin, il expose, dans le dernier chapitre, la description et le processus totalement novateurs de l’initiation dans ses liaisons entre logique des règles du « noyau central » et évolution du jeu pour les pratiquants ; il inaugure fondamentalement une nouvelle conception des règles en tant que droits des joueurs, outils pour les réalisations techniques.

PRÉAMBULE

Nous  étions  en  possession  de  notre  méthode  d’étude  et  de construction du travail pratique sur le terrain, dont nous rendons compte  dans  le  présent  livre,  lorsque  nous  avons  commencé  à publier, dans la revue « Éducation Physique et Sports », une série d’études sur le rugby. Notre intention fut dès le début de fournir ainsi un ensemble qui se tienne et non des articles séparés.

A l’usage il nous est apparu que ce que nous avions à dire — et qui nous semblait pouvoir être de quelque utilité pour le dialogue que nous souhaitions pouvoir  entamer avec nos amis professeurs ou maîtres d’Éducation physique, ou éducateurs de la F.F.R. — imposait un  texte  d’une  importance  trop  grande  pour  que  le  tout  puisse continuer à paraître au fil des numéros de la revue. Simultanément nos amis demandaient que nous fassions paraître l’ensemble d’un seul bloc. D’où notre décision de publier finalement un livre.

Nous  avions  achevé  la  rédaction  complète  en  août  1963, c’est-à-dire plus de quatre ans après le début de notre publication dans la revue (n° 43 de janvier 1959). Nous avions continué à travailler sur la méthode elle-même. Il fallait reprendre l’ensemble et revoir tous les schémas explicatifs. Aussi se trouva-t-il que les dernières modifications aux règles du jeu intervinrent avant que nous ayons pu terminer notre révision. Cela nous a conduits à différer encore la publication afin de mettre le texte à jour. Il est bien évident que notre étude ne représente que notre contribution personnelle forcément modeste et limitée aux efforts d’approfondissement menés de toutes parts en France pour le jeu de rugby.

INTRODUCTION

Le rugby est un sport collectif par excellence. Dans le rugby : technique individuelle (technique dans l’action homme,  contre homme, dans la défense sur la balle et la défense au pied, dans l’action personnelle de chacun  des  joueurs  participant à l’action collective d’une ligne…) et technique collective de base (bien définie) doivent  être  approfondies  simultanément  dans  leurs  rapports  de réciprocité.

Un sport collectif, par ailleurs, ne s’enseigne pas par chapitres successifs, qu’il suffirait d’accumuler les uns après les autres dans le temps, pour aboutir enfin au jeu complet. Il faut, tout au long de la formation du joueur, conserver le jeu réel, source de l’intérêt en même  temps  que  champ  d’expérience  sans  lequel  aucun enseignement ne peut porter ses fruits. Mais il est certain que le jeu normal  de  rugby  avec  ses  15  joueurs  dans  chaque  équipe  reste complexe en même temps que, pour l’étude des joueurs néophytes — et même éventuellement avec des joueurs formés, pour un travail technique centré sur un ou quelques points précis — l’action ne peut pas être assez continue pour à la fois satisfaire le désir de « toucher du ballon » et obtenir pour chaque joueur un nombre d’actions de jeu suffisant pour qu’il puisse y avoir progrès.

La solution réside dans les jeux à effectif réduit pratiqués dans le cadre d’une formation technique rigoureuse. La question qui se pose alors est de savoir dans quelle mesure un jeu à effectif réduit peut conserver les caractéristiques du rugby, avec des différences restant suffisamment faibles pour que ce jeu demeure effectivement préparatoire au rugby à 15.

Il est bien évident, en effet, que s’il n’en est pas ainsi, on se trouve en  présence  d’un  jeu  dont  l’utilisation  ne  peut  avoir  comme conséquence que la création d’un nouveau jeu, apparenté au rugby certes de par son origine, mais qui tendra très rapidement à exister

pour lui-même comme sport codifié à part et à suivre alors son évolution propre.

C’est un problème de même nature qu’il faut résoudre avec les jeux plus spéciaux dans lesquels les possibilités d’action sont exprès réduites à certaines d’entre elles seulement, afin de pouvoir, dans un jeu qui reste réel, soit isoler davantage un aspect important du rugby et le perfectionner (formes jouées du travail technique) soit expliciter davantage une règle fondamentale et parvenir ainsi à la rendre familière.

C’est précisément parce que nous pensons que les richesses du « rugby éducatif » doivent être exploitées à fond sans qu’à aucun moment on puisse tomber dans une déformation du seul véritable jeu de rugby, le rugby à 15, que nous avons entrepris d’analyser les jeux à effectif réduit dans le sens où nous le faisons au cours des lignes qui vont suivre.

La Fédération française de Rugby a mis au point un règlement de jeu à 8 et un règlement de jeu à 7 (le premier autorisant les coups de pied,  y  compris,  sous  certaines  conditions,  le  coup  de  pied  en touche ; le second n’autorisant pas le coup de pied). Le « gratte-poule », le jeu sans placage, les gagne-terrains divers… sont par ailleurs des jeux préparatoires connus.

Par ailleurs et sans prétendre aucunement épuiser la question, mais bien au contraire avec l’espoir d’ouvrir avec nos collègues une discussion  fructueuse,  nous  avons  pensé  qu’on  ne  pouvait  pas aborder la question technique du rugby sans y comprendre une part d’analyse des rapports de jeu (entre l’attaque et la défense), qui situe les conditions imposées aux gestes techniques par le jeu lui-même, et permet du même coup de préciser la valeur et le parti que l’on peut espérer tirer des divers jeux préparatoires.

D’autre part, le rugby est en pleine évolution, comme le prouve la venue des dernières modifications au règlement de jeu. Et il n’y a pas de raison que cette évolution — loi inhérente à tout sport collectif — ne se poursuive pas ultérieurement. Nous pensons que la  façon  qui  consiste  à  aborder  l’étude technique  en  saisissant  les  rapports  vivants  de  jeu,  méthode  que nous nous efforçons d’employer ici, restera toujours valable tant pour rendre compte de l’aspect revêtu par le jeu à un moment donné de son développement que pour saisir le sens même de l’évolution.

Enfin, il n’y a pas, selon nous, de différence de nature entre le travail avec des jeunes, des débutants et le travail avec des joueurs évolués. La clef des problèmes réside toujours dans une vue claire des liens vivants du jeu, lesquels sont dans tous les cas le produit des éléments objectifs suivants :

  • Les courses des attaquants et celles des défenseurs, avec leurs directions et leurs changements de direction, leurs vitesses et leurs changements de vitesse (changements de rythme) ;
  • Les forces de poussée avec leur orientation ;
  • La disposition momentanée des appuis au sol ;
  • La vitesse, la direction, et le sens du déplacement de la balle.

Ces éléments détermineront en particulier l’Espace et le Temps dont  dispose  chaque  joueur  pour  l’action  particulière  qui  va  lui revenir, ainsi que la façon dont la charge adverse va se présenter pour lui dans cette action.

Il est bien évident que toute variation de l’espace et du temps dont dispose un joueur modifie sensiblement le problème technique qu’il a à résoudre. Mais c’est la même logique qui explique la justesse du geste ou du comportement aux différents niveaux de valeur de jeu, quels qu’ils soient. C’est pour cela que le rugby peut s’enseigner. Le lecteur trouvera donc dans l’ordre :

  • Un premier chapitre consacré à l’étude du « rugby éducatif »
  • Un deuxième chapitre consacré à l’analyse des liens vivants du jeu,
  • Un troisième chapitre consacré aux questions d’initiation et d’entraînement.

Merci pour votre lecture !

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