Jeu de mouvement: « Définition » et eclairage

CRMT : TENTATIVE D’ÉCLAIRAGE SUR LA MÉTHODE SOUS FORME D’INTERVIEW.

LE JEU DE MOUVEMENT, C’EST QUOI ?

Le jeu de mouvement, c’est la volonté de d’abord déplacer le ballon dans les zones laissées libres par l’adversaire et donc un jeu basé prioritairement sur l’évitement et la recherche de l’espace libre.

On peut le faire :

  • Par la course=>Porter le ballon soi-même là où l’adversaire n’est pas.
  • Par la passe=> A la main sur l’axe latéral, au pied sur l’axe profond ou/et latéral. (Je n’aborde volontairement pas ici la passe dans l’axe, prémisse du jeu groupé qui pour moi ne concerne pas le jeu « loin de la défense »).

Il nécessite donc une prise d’information sur la défense qui va guider les choix de jeu opportuns, en se déplaçant avec le ballon à 2 mains.

Jeu de mouvement=Déplacement du ballon ET des joueurs. Donc très exigeant physiquement ET techniquement.

LE RUGBY EST POURTANT AUSSI UN SPORT DE COMBAT, NON ? DANS LE RUGBY DE MOUVEMENT, IL N’Y A DONC PAS DE COMBAT ?

Il y a un combat mais qui ne doit être que la conséquence d’une organisation défensive dont les espaces laissés libres, imposent le combat !

Si j’ai un espace libre devant moi, je porte et essaye de profiter de cet espace pour pénétrer la défense adverse, au risque (ou dans le but…) qu’elle se resserre sur moi.

Si l’espace latéral est occupé, que l’espace profond est couvert, alors il faudra attaquer la défense en « forçant un peu les portes » et jouer les espaces autour du défenseur.

MAIS QUE SE PASSE T-IL QUAND ON RENCONTRE L’ADVERSAIRE ?

C’est ensuite une recherche, au contact, de la continuité du mouvement du ballon et donc du jeu.

Cela implique des principes essentiels dans la gestion des contacts (et du soutien) :

  • RESTER DEBOUT
  • Et donc « Travailler son vis à vis » en utilisant le jeu de jambes et d’appuis pour sortir du marquage. On peut aussi le « traverser » lorsqu’on a un gros ascendant physique mais on ne priorise pas cette option (qui en reste une quand la situation est fermée). Car un dominant qui et capable de jouer l’espace sera encore plus efficient (prise d’intervalle, de vitesse donc encore plus dur à arrêter !)
  • Eviter le contact frontal, protéger son ballon en le mettant côté opposé au défenseur avant la gestion du duel.
  •  Au contact, utiliser le bras libre pour repousser l’adversaire (raffût), s’enrouler autour (action/réaction).
  • Chercher à continuer d’avancer au contact ET à faire vivre le ballon (1.Continuité, 2.Conservation).
  • Convergence des soutiens (-1/+1) dès qu’un duel est engagé.
  • Alimenter rapidement l’axe (par le passeur ou le -1=> A discuter…)

D’ACCORD… MAIS SI L’ADVERSAIRE PREND LE DESSUS ET NOUS MET AU SOL ?

Le passage au sol n’est pas (tout à fait…) la fin du mouvement qui doit rester notre priorité. Aussi, au sol, je m’organise pour maintenir le ballon en vie.

Là encore, j’ai une attitude adaptée et des principes d’action :

  • Si je le peux, dans la chute, je relève le ballon pour mon partenaire ou le fais rouler vers mon camp si j’ai un soutien axe.
  • AU contact avec le sol, je cherche le « rebond » (mouvement du corps qui consiste à être actif sur le haut du corps pour le dégager vite et pouvoir présenter le ballon vers son propre camp).

Le 1er soutien doit prendre en compte le rapport d’opposition (RO) pour :

  • Jouer le ballon s’il est disponible, quelque soit son numéro ! (pas de poste dans le jeu de mouvement !)
  • Sécuriser le ballon si l’adversaire est en mesure de le récupérer et uniquement dans ce cas ! (je me consomme QUE si l’adversaire se consomme aussi et j’élimine ce joueur en le saisissant).
  • Déblayer ou « vriller » l’adversaire selon qu’il ait eu le temps de mettre les mains ou non.

Si le ruck est formé et annoncé par l’arbitre, on cherche à y passer le moins de temps possible (sauf si l’adversaire a pris le dessus et qu’on doit restructurer…).

DU COUP, QUELLES RELANCES DE JEU APRÈS UNE PHASE DE FIXATION ?

Là encore le jeu de mouvement doit avoir comme objectif de remettre très vite le ballon en mouvement pour une durée la plus longue possible.

 De ce fait, si une organisation avec une cellule de joueurs assez proches  pour resserrer la défense et la fixer nous paraît envisageable, on lui préfèrera une cellule « mixte » avec des options de passe dans la cellule. Il faudra aussi que cette cellule prenne de la VITESSE pour arriver sur la ligne de front avec un avantage en cas de contact et que le mouvement puisse se poursuivre.

De plus, dans l’organisation collective, on essayera de se redistribuer vite et on cherchera la faille dans le dispositif adverse.

ET DONC, AU PLAN COLLECTIF, COMMENT ÇA SE TRADUIT ?

Le RO guide les options de jeu collectives en gardant à l’esprit que le porteur est le seul à choisir.

Les soutiens sont des solutions qui proposent des options au porteur en le guidant et l’accompagnant avec une communication adaptée, qui peut être définie par les joueurs eux-mêmes (codification à trouver pour informer le porteur).

L’objectif est d’occuper au maximum l’espace afin de proposer TOUTES les options et formes de jeu au porteur.

3 formes de jeu qu’on schématise ici :

Si la défense est dense et resserrée, on cherchera à la contourner par un jeu de passes latérales (le ballon va plus vite que les joueurs)=>Jeu déployé.

Si la défense est écartée (beaucoup d’espace entre les joueurs constituant le 1er rideau), on cherchera à la pénétrer en attaquant les intervalles entre les joueurs par la course ou des passes très courtes plutôt dans l’axe profond=> Jeu groupé.

Si la défense occupe la largeur avec une densité suffisante pour contrer le jeu groupé, on change de plan et d’espace de jeu=>Jeu au pied.

On pourrait y ajouter le déployé pénétrant qui est un entre-deux entre les 2 1ères formes…

ÇA VEUT DIRE QUE QUELQUE SOIT L’ENDROIT OÙ ON SE TROUVE SUR LE TERRAIN, C’EST LE RAPPORT D’OPPOSITION QUI GUIDE LES CHOIX DE JEU ?

En effet, les principes de jeu sont valables quelque soit l’endroit où on se trouve sur le terrain !

Avec toutefois des paramètres extérieurs (éléments indispensables dans les choix stratégiques et tactiques) à prendre en compte que nous vous présentons ici :

  • Le score
  • La météo
  • Le temps de jeu écoulé ou restant
  • L’arbitrage.

Mais aussi quelques variantes et adaptations selon l’endroit où on se trouve sur le terrain, relativement à la largeur et la profondeur du terrain.

Par exemple, un 2 contre un à 5m de l’en-but adverse bord de touche, on tentera le tout pour le tout pour marquer, quitte à se faire projeter en touche.

À 5m de sa propre ligne, on cherchera à rester au maximum dans le terrain et donc la gestion sera différente.

Ces situations doivent être travaillées avec rigueur et précision pour prendre tout leur sens.

CELA IMPLIQUE DONC UN TRAVAIL EN OPPOSITION SYSTÉMATIQUE AUX ENTRAÎNEMENTS ?

Si on entend par systématique, à chaque entraînement, la réponse est OUI !

Si on entend « tout le temps », la réponse est NON.

On peut envisager un travail très spécifique de gestes fermés sans opposition qu’il faudra toutefois recontextualiser au plus vite.

Et on manipulera l’espace ou le temps pour imposer des contraintes, notamment dans le travail technique, au plus proche de la réalité du jeu. Sur le travail de passes par exemple, des plots, piquets, barrière, opposants manipulés, chronos… peuvent être des variables d’ajustement dans une évolution de ce travail.

ON PEUT DONC FAIRE UN TRAVAIL TECHNIQUE SANS OPPOSITION DIRECTE ?

OUI ! Quoique…

Dans notre conception, le geste technique se réalise en jeu et ne doit répondre qu’à une situation particulière.

Les notions d’espace-temps, de timing, d’axe et direction de course sont fondamentales dans l’exécution technique.

Aussi, dans l’exécution technique, une des données à prendre en compte et à mettre en application sera la vitesse.

Si certains jeux au pied, certaines passes, peuvent se travailler « à vide » ou presque, on privilégiera au maximum un travail en opposition +/- relative.

ET DU COUP, COMMENT ABORDEZ-VOUS LES PHASES STATIQUES ?

Les phases statiques, au même titre que les phases de fixation, font partie du jeu de rugby. Elles sont donc indissociables de l’activité et doivent être travaillées en conséquence de leur place dans le jeu.

Si nous concevons que ces phases soient spécifiques et nécessitent un travail de réglage important, elles doivent être elles aussi travaillées en opposition (totale ou raisonnée) et envisagées dans le jeu !

C’est pour cette raison que nous passerons un temps réduit en travail séparé pour lui privilégier si ce n’est un travail en collectif total, au moins un travail en collectif partiel, y compris lors du travail de phases statiques.

Par exemple, on peut travailler la mêlée avec le 5 de devant d’un côté, pendant que les ¾ travaillent les lancements avec les 3ème lignes avant de se retrouver en collectif total pour la mise en application sur du jeu réel.

Sur touche, on peut laisser le 10 (ou 15) à disposition pour travailler la conquête+sortie de camp et/ou jeu autour avec les avants sur des lancements à partir de réduites.

Concernant les lancements de jeu, on s’efforcera de toujours avoir 3 sorties possibles afin que dans un mouvement relativement fermé, on garde une part d’adaptation et donc d’incertitude liée à la réaction de la défense qui ne sera pas automatiquement celle prévue ! Cela permet en outre de travailler avec une défense qui connaît nos lancements sans être impacté dans notre travail.

Offensivement, on ne prévoira qu’un seul temps de jeu (lancement) et selon son efficacité, on adoptera des principes de jeu sur le 2ème temps.

Ces principes tiendront compte de :

  • L’efficacité du lancement relativement au terrain gagné sur l’espace large et/ou profond
  • Disponibilité du ballon, le cas échéant, sur la phase de fixation
  • Nombre de défenseurs et soutiens consommés
  • Déséquilibre créé (favorable-égal-défavorable)

DONC L’ENTRAÎNEMENT AU JEU DE MOUVEMENT, C’EST UN ENTRAÎNEMENT EXCLUSIVEMENT TOURNÉ SUR L’OFFENSIVE ? QUELLE EST LA PLACE ET/OU CONCEPTION DE LA DÉFENSE ?

C’est vrai qu’on pourrait le penser !

Mais en adoptant systématiquement des formes d’entraînement en opposition, on travaille forcément l’attaque ET la défense.

Et on va même au-delà en intégrant dans nos formes d’entraînement que lorsqu’on manipule la défense, on fait travailler l’attaque et que lorsqu’on manipule l’attaque, on fait travailler la défense. C’est donc un travail de coopération à faire intégrer rapidement aux joueurs. Il permet de les responsabiliser et de créer un climat d’apprentissage et de solidarité au sein du collectif.

Et lors des situations en opposition, ce qui est fondamental et qu’on va plus loin que le « simple rapport attaque-défense », c’est de laisser le droit (et le devoir !) à la défense, de contre-attaquer et à l’attaque de passer du statut d’attaquant à celui de défenseur dans le même mouvement=> turn-over.

Trop souvent, dans les formes de travail proposées, quand on travaille l’attaque, chaque ballon perdu ou tombé est rejoué. La défense qui devrait alors être récompensée pour avoir contré l’attaque est frustrée de ne pouvoir profiter de l’opportunité d’attaquer et l’attaque n’est pas « sanctionnée » de son erreur.

Si la défense n’est jamais valorisée, alors les joueurs défendront à moitié et le travail en attaque n’aura pas de sens. Si l’attaque ne voit pas la nécessité de se réorganiser très vite sur une perte de balle, elle sera en difficulté en match si cela se produit…

C’est pour nous une aberration ! 

Dans notre conception, ON DÉFEND POUR POUVOIR ATTAQUER.  Cela signifie que notre organisation défensive doit être gérée pour récupérer la balle autant que pour pour empêcher l’adversaire de progresser ou de marquer (même si ces objectifs seront aussi visés…).

Notre organisation défensive a pour objectif de contraindre l’adversaire dans sa progression voire de prendre le pas sur lui dans cette progression.

Le rugby est un jeu de gagne terrain et plus on avance en défense, plus l’espace-temps (de décision et d’effection) se réduit. On pousse donc l’adversaire à la faute soit pour récupérer le ballon sur une faute de main ou un jeu au pied soit sur un contest debout ou au sol (être 1er sur la zone de combat).

On abordera ensuite les différents types de défense (ouverte, fermée, rush…), les axes de course qui s’y rattachent et la circulation dans les différents rideaux défensifs.

Tout comme les enchaînements offensifs tiennent essentiellement compte de la défense, ceux défensifs, dépendent des formes de jeu utilisées en attaque.

Pour lire, comprendre et appréhender une attaque ou une défense (et donc un rapport d’opposition) seul le travail en opposition systématisé nous semble opportun.

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