Gagner en jouant mal ou perdre en jouant bien ?

Pierre VILLEPREUX

Il vaut mieux gagner en jouant mal que perdre en jouant bien.

C’est sans doute ce que doivent penser les équipes largement favorites qui ont eu du mal à remporter ce premier match. Il faut bien le dire, c’est un match souvent délicat pour les présumées meilleures nations dès lors qu’on leur accorde une compétitivité supérieure face à des nations présumées plus faibles. Les excellentes résistances du japon, des Etats-Unis , de la Roumanie respectivement contre la France, l’Irlande et l’Ecosse et à un degré moindre la semi performance de la Nouvelle-Zélande face au Tonga et celle de l’Australie contre l’Italie peuvent réjouir l’IRB puisque la vision de cette instance , c’est bien depuis 95 et au fil des coupes du monde d’avoir de plus en plus de nations compétitives. Les premiers résultats semblent aller dans ce sens mais il faut relativiser. On sait que lors de la première journée, psychologiquement, le niveau d’engagement des moins bien classés est au top, ce qui n’est pas forcément le cas pour leurs opposants qui savent que le rapport de force existant pourra éventuellement leur permettre quelques fantaisies et approximations.

On pourrait en dire tout autant pour les matchs qui ont opposé entre elles des nations dans un contexte plus équilibré. Je pense notamment à Angleterre-Argentine et Afrique du sud-Galles à qui la victoire en terme de qualité de production apporte plus d’insatisfactions que de satisfaction.

Mais gagner mal, même quand on relative, laisse des traces ? Cela remet en cause la manière et par la même les principes tactiques et stratégiques que l’on espérait acquis pendant la préparation et que l’on voulait voir se mettre en place et oeuvre que ce soit en attaque et en défense, et d’abord en ce qui concernent d’abord le jeu dans les phases de mouvement et dans le lien logique qui se réalise entre ce mouvement général, son arrêt éventuel en passant par un ruck et dans la continuité la relance de ce mouvement général.

La France nous a par le passé habitué à ce genre de production laissant aux adversaires le soin de gérer le spectacle. Peut on s’en satisfaire ? certainement pas ! D’autant moins que le japon, même si il est logique de s’enthousiasmer sur sa remarquable capacité à développer un rugby entreprenant, essentiellement à la main, le doit en grande partie au dysfonctionnement défensif des tricolores qui laissèrent des espaces de jeu mal couverts, une faiblesse que le collectif japonais su exploiter. Dysfonctionnement inquiétant car le japon aussi sympathique soit sa performance , ne joue pas encore dans la cours des grands, et c’était vraiment une occasion de s’investir dans le jeu souhaité. Je suis certain que c’était aussi l’ambition du staff. Mais je crois que cette équipe à beaucoup de mal à prendre le jeu à son compte. Vouloir le faire est une chose, pouvoir le faire collectivement en est une autre quand il s’agit d’agir et de réagir en choisissant face aux diverses situations le jeu et la vitesse de celui-ci la décision la plus adaptée et le geste technique qui s’impose. Une telle entreprise collective réclame pour le porteur de balle et tous ses partenaires une même lecture du jeu, rapide, juste et bien sur les réponses adaptées en terme de course du porteur de balle et des soutiens. En début de match, pas mal d’occasions à ce niveau là se doivent d’être gagnantes. Si elles ne l’ont pas été, c’est que la capacité des uns et des autres dans l’action à choisir la réponse adaptée et à la mettre en oeuvre est en cause. Les bleus y arrivent plus facilement dans les actions collectives qui concernent les turn-over , mettant du même coup en avant les limites défensives des japonais, un secteur ou leur faiblesse risque de leur couter cher surtout face aux Néo-Zélandais.

Cette difficulté à créer ensemble en s’appuyant sur une meilleure lecture du jeu est elle maintenant transformable ? C’est pas impossible mais difficile en pleine compétition mondiale.

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